Un jury composé de libraires, bibliothécaires, archivistes, historiens et généalogistes, attribue désormais chaque année (et pour la première fois en 2018) un prix au meilleur récit non encore publié, le lauréat étant ensuite publié dans cette collection par Archives & Culture.
Ce prix, remis à l’occasion du Salon de généalogie de Paris 15, a été décerné à Lucienne, parcours singulier, remarquablement écrit,d’une petite Bretonne (1889-1987) dont la longue vie traverse toutes les fractures et les conflits du XXe siècle.
Partie en 1908 comme préceptrice à Breslau, en Silésie, épouse d’un Allemand en 1913 (ça tombe mal), elle divorce dans les années 1920, revient en France, est réquisitionnée par les Allemands comme interprète sous l’Occupation, tout en entrant en parallèle dans un réseau de résistance...
Lucienne
– Hauptmann-Graf Arnold von Falck, commandant en second de la Kommandantur. Nous voulons organiser un service de traduction et d’interprétariat à Vannes. Il n’y a pas beaucoup de germanophones ici. Nous avons eu votre nom par le lycée, Madame Thomas. Vous avez vécu en Allemagne, vous avez été mariée à un Allemand, n’est-ce pas Frau Hagen ? Après avoir divorcé, vous êtes revenue à Rennes et vous êtes maintenant professeur certifié d’allemand au lycée de filles. Vous enseignez également l’anglais et le latin. Voilà, Madame, ce que nos services savent. Avons-nous fait quelque erreur ?
– Non, Monsieur le capitaine.
– Parfait, alors je vais droit au but. Nous avons besoin de vos services pour traduire et interpréter. Nous sommes sûrs de votre probité intellectuelle et vous ne pouvez pas renier la moitié de votre histoire personnelle. Vous serez bien sûr rémunérée. Avez-vous des questions ?
– Je sais qu’il y a peu de germanophones à Vannes. J’accepte de vous rendre ces services mais je préférerais ne pas être rémunérée.
– Vous n’aurez pas le choix, chère Madame. Ah, j’oubliais. Mon chef, l’Oberst Müller, veut à tout prix améliorer son français. Il est, comme moi, amoureux de la culture française, mais il n’est pas encore très avancé dans la maîtrise de votre langue. Pouvez-vous lui donner des leçons, rémunérées bien sûr ?
– Je ne pense pas pouvoir refuser.
– Je vois que nous nous comprenons très bien.
DRH au sein d’un grand groupe international dans une autre vie, Yann Boulanger se consacre à ses passions de toujours : la musique et l’écriture. Il a composé une centaine de chansons et écrit plusieurs ouvrages. Celui-ci est une histoire vraie, récit du parcours singulier d’une femme d’exception, féministe et résistante.
Ce roman a reçu le prix Souvenirs familiaux 2018.